Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/47

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fut toujours pour lui Adèle, parce que ce nom rime avec shell, spell, Knell (cercueil, charme, glas.)

« La beauté de ses sœurs ne faisait que ressortir mieux encore sa splendeur, tandis que ma propre timidité, ma sauvagerie étaient comme raidies et enlisées dans mon infatuation d’anglais et de protestant que n’adoucissaient ni la politesse ni la sympathie. En sorte que, dans nos réunions, je restais assis seul et lamentablement jaloux, semblable à un poisson figé, (j’imagine que je devais ressembler a une raie s’essayant à briser la glace de son aquarium), tandis que, dans nos bienheureux tête-à-tête avec la dame de mes pensées, — espagnole de naissance, parisienne d’éducation, catholique de cœur, — je cherchais à lui communiquer mes idées sur l’invincible Armada, la bataille de Waterloo et la doctrine de la transsubstantiation. »

C’est ainsi que cinquante ans après, la jeune fille mariée et morte même depuis longtemps, le vieillard parle de ce premier amour qui, assurément, fut très profond et qui eut un réel retentissement sur sa carrière et sa santé. Les deux pères songeaient à un mariage que Mme Ruskin, sévère calviniste, considérait comme un scandale et une impossibilité. Le jeune homme tout naturellement