Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/72

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l’État, le pouvoir ne peut remplacer la liberté. La puissance que la femme exerce sur son mari lui dorme souvent ce qu’elle n’a aucun droit d’avoir, et ne lui donne pas les moyens d’assurer ses propres droits. L’esclave favorite d’un sultan possède elle-même des esclaves qu’elle tyrannise ; il vaudrait mieux qu’elle n’en eût pas, et ne fût pas elle-même esclave. En absorbant sa propre existence dans celle de son mari, en n’ayant aucune volonté, ou en lui persuadant qu’elle ne veut que ce qu’il veut dans toutes leurs affaires communes, et en employant toute sa vie à agir sur ses sentiments, elle peut se donner la satisfaction d’influencer et probablement de pervertir sa conduite dans les affaires dont elle ne s’est jamais rendue capable de juger ou dans lesquelles elle est totalement dominée par quelque motif personnel ou par quelque préjugé. En conséquence, dans l’état présent des choses, ceux qui en usent avec le plus de bienveillance avec leur femme sont tout aussi souvent corrompus que raffermis dans l’amour du bien par l’influence de leur femme, quand il s’agit d’intérêts qui s’étendent hors de la famille. On a appris à la femme qu’elle n’avait pas à s’occuper des choses placées hors de sa sphère ; elle n’a donc que rarement une opinion vraie et consciencieuse à leur sujet ; par conséquent elle ne s’en occupe jamais dans un but légitime et