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de politique à tort et à travers ; qu’à dix-huit ans, on se mêle de faire des constitutions comme on fait des tragédies. Un tel enseignement ne peut que fausser les idées de la jeunesse et l’initier prématurément à des matières qui dépassent la mesure de sa raison. C’est avec ces notions mal digérées, mal comprises, qu’on prépare de faux hommes d’État, des utopistes dont les témérités d’esprit se traduisent plus tard par des témérités d’action.

Il faut que les générations qui naissent sous mon règne soient élevées dans le respect des institutions établies, dans l’amour du prince ; aussi ferais-je un usage assez ingénieux du pouvoir de direction qui m’appartient sur l’enseignement : je crois qu’en général dans les écoles on a un grand tort, c’est de négliger l’histoire contemporaine. Il est au moins aussi essentiel de connaître son temps que celui de Périclès ; je voudrais que l’histoire de mon règne fût enseignée, moi vivant, dans les écoles. C’est ainsi qu’un prince nouveau entre dans le cœur d’une génération.

Montesquieu.

Ce serait, bien entendu, une apologie perpétuelle de tous vos actes ?

Machiavel.

Il est évident que je ne me ferais pas dénigrer. L’autre moyen que j’emploierais aurait pour but de réagir contre l’enseignement libre, que l’on ne