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ma puissance, est-ce donc qu’ils peuvent méconnaître les services réels que je rends, mon génie et même ma grandeur ?

Je suis le bras, je suis l’épée des Révolutions qu’égare le souffle avant-coureur de la destruction finale. Je contiens des forces insensées qui n’ont d’autre mobile, au fond, que la brutalité des instincts, qui courent à la rapine sous le voile des principes. Si je discipline ces forces, si j’en arrête l’expansion dans ma patrie, ne fût-ce qu’un siècle, n’ai-je pas bien mérité d’elle ? ne puis-je même prétendre à la reconnaissance des États européens qui tournent les yeux vers moi, comme vers l’Osiris qui, seul, a la puissance de captiver ces foules frémissantes ? Portez donc vos yeux plus haut et inclinez-vous devant celui qui porte à son front le signe fatal de la prédestination humaine.

Montesquieu.

Ange exterminateur, petit-fils de Tamerlan, réduisez les peuples à l’ilotisme, vous n’empêcherez pas qu’il n’y ait quelque part des âmes libres qui vous braveront, et leur dédain suffirait pour sauvegarder les droits de la conscience humaine rendus imperceptibles par Dieu.

Machiavel.

Dieu protège les forts.

Montesquieu.

Arrivez donc, je vous prie, aux derniers an-