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Bien qu’aux xviie et xviiie siècles, la lutte autrefois si ardente et si âpre des juridictions civiles contre les juridictions ecclésiastiques fut depuis longtemps terminée et que la victoire du pouvoir laïque ne fut plus guère contestée, l’étude du droit canonique n’était pas encore devenue superflue, même pour de futurs officiers royaux. On comptait encore nombre de matières mixtes, — questions de serments, de mariages, d’état civil, de successions, — où chacune des deux juridictions avait conservé sa compétence spéciale ; et d’ailleurs les limites de l’une et de l’autre n’étaient pas si rigoureusement tracées qu’elles n’offrissent encore bien des occasions de litige. L’ordonnance du 30 janvier 1700 avait donc très judicieusement disposé que les candidats à la licence devraient suivre pendant un an au moins un cours de droit canon ; le titre de gradué in utroque jure qu’on leur décernait après leurs études n’avait pas perdu toute signification. Quant aux gradués en droit canon, on a vu qu’ils devaient, à leur tour, étudier les Institutes.

Deux professeurs étaient chargés, comme on sait, de l’enseignement des lois de l’Église. Mais quelle lourde tâche était la leur ! N’allaient-ils pas se perdre au milieu de cet immense amas de documents qui formait le droit canonique, depuis le Décret de Gratien jusqu’aux décisions du Concile de Trente ? Nos professeurs avignonais, moins bien préparés peut-être que d’autres à l’enseignement et, en tous cas, voyant leurs fonctions limitées à une période triennale, auraient peut-être hésité, comme le disait l’un d’eux en montant dans sa chaire, « à affronter cette mer féconde en naufrages[1] », s’ils avaient dû faire autre chose que commenter un recueil devenu

  1. Cours de droit canonique professé à l’Université d’Avignon en 1720. M. C. 669, fo 10.