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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


maître de sa raison critique, malgré l’envahissement lent d’une douleur nouvelle, inconnue, il lut, relut, l’une après l’autre, les pièces du dossier[1].

Aucune ne peut, sans absurdité, de bonne foi, s’appliquer à Dreyfus. Le mémento de Schwarzkoppen, sur l’officier suspect, semble nommer Esterhazy[2]. « Ce canaille de D… » ne saurait être un officier, ni Esterhazy ni Dreyfus[3]. La lettre banale, où il est question de Davignon, ne prouve rien[4]. Il reconnut l’écriture de Guénée[5] dans l’imbécile rapport sur le voyage de l’attaché espagnol en Suisse, voyage qui aurait été dénoncé à l’attaché allemand par un officier.[phrase supprimée, voir discussion.]

Ne sachant rien de la notice biographique de Dreyfus qu’Henry avait confectionnée avec Mercier, Boisdeffre et Sandherr[6], il pensa que c’était le commentaire de Du Paty qui avait été communiqué aux juges. Il fut pris d’un immense dégoût : Quoi ! chez un officier, et chargé d’une telle mission, tant de déloyauté ! une telle fraude ! une telle sottise[7] !

Depuis longtemps, il l’avait en méfiance, connaissait les vilaines histoires où ce faux aristocrate avait été mêlé. Il oublia Sandherr, Henry, Gonse, Mercier ; le crime, pour lui, s’incarna tout entier en Du Paty.

  1. Le commentaire et les quatre pièces étaient dans une enveloppe spéciale. (Revision, 125.) Il y avait, encore, dans la grande enveloppe, « quelques autres pièces, qui avaient l’air d’un rebut », plusieurs photographies de la pièce Canaille de D… (Cass., I, 139 ; Rennes, I, 410, Picquart).
  2. Instr. Fabre, 86 ; Cass., I, 135 ; Rennes, I, 403, Picquart.
  3. Cass., I, 137 ; Rennes, I, 405, Picquart.
  4. Cass., I, 136 ; Rennes, I, 404, Picquart.
  5. Cass., I, 138, 155 ; Rennes, I, 409, Picquart.
  6. Voir t. I, 359 à 364.
  7. Rennes, I, 431, Picquart.