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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


de justice, il s’en inquiétait. L’événement démentit ces craintes. L’article documentaire du Figaro n’eut pas de suite. Un seul écrivain, Cassagnac, osa dire le doute qui, de nouveau, obsédait les consciences[1]. Passée la tempête, et en attendant qu’elle revînt, Cassagnac redevenait courageux, plein de sens. Il n’est pas seulement « l’adversaire implacable de tout jugement rendu au fond d’une cave, par la sainte Vehme ou par un conseil de guerre » ; mais il n’a pas la superstition des juges militaires, « point infaillibles, ni plus éclairés ni plus honnêtes que leurs frères, cousins et amis, les jurés, qui se trompent souvent ». Enfin, le Jour, qui appartenait au beau-frère de Rochefort, annonça une enquête sur l’affaire, avec des « documents inédits », mais ne publia qu’un article ; Boisdeffre fit racheter le second[2].

    pos : « Vous allez en avoir une campagne de presse ! Ils ne savent pas ce qui les attend là-haut. » Et encore : « S’ils ne veulent pas marcher là-haut, je leur forcerai la main. » (Instr. Fabre, 22, 48.) Il précise que c’était entre le 25 août et le 6 septembre 1896, plutôt en septembre. — Picquart convient qu’il a pu exprimer devant Gribelin sa crainte d’une campagne de presse, mais il « ne croit pas s’être jamais exprimé de cette façon, surtout devant Gribelin, qui oublie trop, dans tout ceci, qu’il n’est et n’a jamais été qu’un agent subalterne. » (98, 128.)

  1. Autorité du 14 septembre 1896 ; l’article est intitulé « le Doute ».
  2. Jour du 11 septembre, article signé Adolphe Possien. — Vaughan, administrateur de l’Intransigeant, protesta contre la publication de cet article, soupçonnant (à tort) qu’il était payé. (Souvenirs sans regrets, 62, 63.) Possien avait seulement relaté, amplifié des propos de Forzinetti, toujours directeur du Cherche-Midi et qui continuait à affirmer l’innocence de son ancien prisonnier. Le beau-frère de Rochefort, Vervoort, refusa le second article, que Possien essaya de placer dans un autre journal ; il le colporta » de rédaction en rédaction ». Boisdeffre en fut informé ; il avait été fort mécontent de cette menace de révélations ; il chargea Picquart de faire voir Possien par le commissaire spécial Tomps, qui réussit dans sa négociation. (Cass., I, 164, Picquart ; 764, Tomps).