Gonse, bien que le service soit dans ses attributions. Henry, vieux soldat fidèle, chien de garde de l’Arche, se permet d’insister : « En fait d’indiscrétions, vous feriez peut-être bien de reprendre le dossier secret, car je l’ai vu, il y a quelques jours, sur son bureau, en présence d’une tierce personne[1]. »
Mesurant la portée de chaque coup, Henry ne nomme pas encore à Gonse cette tierce personne[2]. Il sait l’art de préparer les mensonges ; il ne sort jamais tout son mensonge, du premier coup, brusquement.
Gonse ne met pas en doute la parole d’Henry. Si, d’ailleurs, il a besoin d’un autre témoin, Gribelin est prêt.
Par une coïncidence admirable, le même jour (30 octobre), Guénée remit à Henry une « note confidentielle[3] ».
Il y revenait, d’abord, sur l’article de l’Éclair affirmant encore que les Dreyfus l’avaient inspiré ; Sabatier, le directeur du journal, « et son mauvais conseiller et payeur Castelin » sont leurs complices. La dame Bodson, ancienne maîtresse de Dreyfus, a été mêlée aussi à cette intrigue. Guénée racontait ensuite une conversation, d’ailleurs mensongère, entièrement inventée, qu’il aurait eue avec Picquart, « dans les premiers jours de septembre » ; ce jour-là, Picquart lui a confié
- ↑ Procès Zola, I, 359, Henry. — Je reproduis textuellement le dialogue tel que le relate Henry ; Gonse ne le démentit pas au procès Zola et le confirme devant la Cour de cassation (I, 252, 253 ; II, 354).
- ↑ Procès Zola, I, 359, Henry : « Je n’ai pas indiqué la personne. » — Cass., II, 554, Gonse : « Henry ne m’avait pas dit le nom. » De même, Procès Zola, I, 377.
- ↑ Cass., I, 724 ; « N’avez-vous pas été chargé, alors que le lieutenant-colonel Picquart dirigeait le bureau des Renseignements, de faire des rapports sur ledit Picquart ? — Guénée : Jamais. » — Or, le rapport est au dossier Tavernier.