Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 2.djvu/498

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
488
HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


ces attaques répétées l’affolent. Il a envoyé plusieurs personnes pour demander qu’on le laisse tranquille. Ça ne fait que commencer !

Pour vous, si vous avez jamais besoin de faire passer quelque chose dans les feuilles de mes amis, zu diensten[1].

En effet, ses journaux marchaient. On reconnaît sa marque de fabrique, sa science frelatée et ses haines, dans une série d’articles de la Libre Parole et de l’Intransigeant qui firent alors quelque bruit. Il y répète, ou fait répéter, ses diatribes habituelles contre les généraux et contre Henry[2]. Rochefort publie de longs extraits d’une lettre qu’il a reçue « d’un officier supérieur en activité de service » et dont le style ne laisse nul doute :

Le haut commandement est au-dessous de tout : dites-le, répétez-le, criez-le… C’est une vraie monstruosité de voir le commandement suprême de l’armée aux mains d’un vieillard septuagénaire qui, sur le terrain, en paix comme en guerre, a été jugé depuis longtemps à sa valeur, qui est nulle… Au 18e corps, en 1870, Billot a été de la plus insigne faiblesse, au-dessous de tout ; récemment, aux manœuvres du Nord, il fut piteux… Quant à Boisdeffre, sottement entiché d’une noblesse qui n’a même pas le mérite, mince aujourd’hui, d’être sérieuse, c’est un paresseux, ignorant comme une carpe, tellement rossard qu’il n’a pas eu le courage d’apprendre un mot d’allemand. Ce que les Prussiens doivent se tordre et se moquer de nous !

Et voici l’avertissement à Henry :

Du reste, grâce à ses chefs, — tel maître, tels sous-ordres, — cet État-Major suprême est tellement singu-

  1. En allemand : À votre service.
  2. Libre Parole des 12, 13, 14, 18, 19 mars 1897, sous la signature du C Z. ; Intransigeant du 28 février, du 3 mars, etc. — J’ai sous les yeux les coupures mêmes qu’Esterhazy envoya à son correspondant.