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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


naissait beaucoup ; il s’offrit à lui répéter leur conversation, Scheurer y consentit et, quelques jours après, Bertin avertit Billot[1].

Dans une deuxième entrevue, un peu plus tard, Bertin ne réussit pas davantage à lever les doutes de Scheurer. Celui-ci l’avait trouvé passionné, haineux, incertain de la culpabilité qu’il affirmait, mais qu’il ne démontrait pas.

D’autres informations, mais favorables à Dreyfus, se trouvèrent, après examen, exagérées ou inexactes.

Lalance avait raconté à Scheurer que des Mulhousiens, préoccupés de la même pensée que lui, étaient allés à Berlin et que le chancelier, ayant à leur demande interrogé l’Empereur, avait rapporté cette réponse : « Je donne ma parole d’honneur, non d’Empereur, mais de gentilhomme, que Dreyfus est innocent. »

Scheurer, voulant vérifier l’anecdote, s’adressa à l’un des Alsaciens qui auraient fait la démarche ; Théodore Schlumberger lui dit aussitôt qu’il n’était pas allé à Berlin, mais que Mieg-Kœchlin et lui avaient écrit au prince de Hohenlohe pour rassurer leur conscience. Le chancelier leur avait fait cette réponse : « Dès le début de l’affaire, le gouvernement allemand a déclaré, officiellement et spontanément, au gouvernement français qu’il n’a jamais eu de relations avec Dreyfus[2]. »

  1. Rennes, I, 168, Billot : « Au mariage de Mlle de Miribel, auquel assistait le colonel Bertin, il demanda à me voir et, dans la soirée, me mit au courant de la pensée de Scheurer-Kestner. » De même Bertin (II, 45).
  2. Scheurer donne, dans ses Mémoires, le texte même de cette lettre, qui lui fut remise par Théodore Schlumberger : « Je comprends le but que vous poursuivez ; votre démarche est des plus honorables. Mais, dès les premiers moments de cette affaire, le gouvernement allemand a déclaré, officiellement et spontanément, au gouvernement français qu’il n’avait jamais été en relations avec Dreyfus. Depuis lors, il y a eu