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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


mais sans lui parler ; cependant, il n’affirme pas que ce fût pendant qu’il copiait la note.

D’Ormescheville s’empare avec joie de cette histoire, et conclut que la note a été connue de Dreyfus[1].

Enfin, il travailla beaucoup avec Bertillon. Du Paty, ayant imaginé que la famille de l’accusé se servait, pour lui écrire, de procédés de cryptographie et d’encre sympathique, s’était fait remettre les lettres qui étaient arrivées au Cherche-Midi[2]. Il invita D’Ormescheville à les soumettre à l’examen de Bertillon[3].

À peine Bertillon eut-il vu la première de ces lettres, qui était de Mme Dreyfus à son mari, qu’il sursauta. Il y avait aperçu « l’a négatif qui l’avait tant frappé dans l’écriture de l’accusé ». Une autre lettre, signée Alice, l’une des belles sœurs de Dreyfus, lui montra l’s long en second qui était une des caractéristiques du bordereau. Enfin, D’Ormescheville ayant recherché d’autres lettres, en trouva une qui avait été saisie chez Dreyfus, dans un buvard, que Mme Dreyfus avait remise elle-même à Du Paty, et qui était de Mathieu. Dans cette lettre, non datée, il était question d’une émission d’obligations et de fusils de chasse. Mais le sens importait peu. Bien que les deux écritures n’eussent aucune ressemblance, Bertillon reconnut, dans celle de Mathieu, « le modèle exact de toutes les formes signalées par les experts comme des divergences graphiques entre celle de Dreyfus et le bordereau[4] ». L’s long y manquait seul, mais Bertillon l’avait dans la lettre signée Alice[5].

  1. Cass., II, 85, Rapport.
  2. Dreyfus n’en avait pas eu connaissance.
  3. 10 novembre.
  4. Cass., I, 491, Bertillon.
  5. Rennes, II, 490, Bertillon.