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LA CHUTE DE MERCIER


secouer son indifférence germanique[1] ». De même Barrès[2], Léon Daudet : « Pour ce scélérat, la souffrance n’est rien. Nous sommes plus torturés que lui[3] ». Edmond Lepelletier : « La protestation proférée par le misérable, le serment sur la tête de ses enfants, autant de mensonges et de comédies. » Mais il y a autre chose « dans cette divagation » : « Cet abominable et pervers scélérat cherche à provoquer la guerre avec l’Allemagne. » En révélant les causes de sa condamnation, il a voulu « enlever à la patrie le bénéfice du huis clos ». « Le doute qu’il tente de faire pénétrer dans certaines âmes », c’est sa vengeance. « Vous voyez bien qu’il eût été préférable de le laisser écharper… Il vit pour essayer de nous faire encore du mal. Lynch aurait dû remplacer le général Darras à la fin de la parade lugubre et inefficace[4]. » Rochefort : « Il n’avait d’autre peur que celle d’être lynché par la foule. Quand il a vu qu’elle se contentait de le huer, il a repris son insolence des plus beaux jours[5]. » Cassagnac dénonce, comme une autre trahison, la protestation suprême du supplicié : « Il n’a songé à sa femme et à ses enfants que pour les vendre aussi. Pourquoi cet épouvantable serment sur des têtes innocentes ? Pourquoi ce blasphème de

  1. Petit Journal du 6 janvier. — l’Avenir militaire, qui voit si justement le doute naître à la fois du mystérieux procès et de la dégradation publique, exprime lui-même le regret de l’abolition des « tortures raffinées auxquelles la législation française a demandé pendant des siècles une satisfaction à la vindicte des lois contre les perturbateurs de l’ordre public ». Du moins, l’« attitude cynique de Dreyfus » est un argument en faveur de ces supplices.
  2. Cocarde du 6.
  3. Figaro du 6.
  4. Écho de Paris du 9.
  5. Intransigeant du 9. — Dans le numéro du 7 : « Rien de plus révoltant que l’attitude arrogante et rageuse du misérable. »