Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/16

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habile, échoit à un homme livré dès sa jeunesse aux travaux sévères de l’administration des armées, et qui n’aborde qu’en tremblant la tâche inaccoutumée que le sort lui confie. N’importe : il cherchera sa force dans son dévouement ; les souvenirs du foyer lui viendront en aide, et, s’il s’égare sur la route ou la parcourt d’un pas mal assuré, il puisera son excuse dans le culte domestique dont la mémoire de M. Joubert est entourée, et qui commande à sa famille ce pieux et dernier hommage.

Joseph Joubert naquit, le 6 mai 1754, à Montignac, petite ville du Périgord, où son père exerçait la profession de médecin. C’était le premier fruit d’une union qui allait être féconde. Sa naissance fut suivie, en effet, de celle de sept autres enfants, et son éducation dut se ressentir de la gêne qu’apportait, dans une fortune étroite, la survenance de tant de puînés. Nous n’avons, au surplus, d’autres détails sur les premières années de sa vie que ceux qu’il a donnés lui-même dans sa correspondance. Jl rend grâces au ciel d’avoir été un enfant « doux », et raconte, avec une naïveté sous laquelle ou sent des larmes, l’amour passionné qu’il avait pour sa mère, femme d’un mérite éminent, qui, à défaut d’autres richesses, avait du moins donné à ses enfants celles du bon conseil et du bon exemple.

À quatorze ans, il avait appris tout ce qu’on pouvait apprendre alors dans une petite ville du Périgord. 11 partit bientôt pour Toulouse, dans le dessein d’y étudier le droit et de se consacrer ensuite au barreau. Mais il ne tarda guere à reconnaître que son instruction classique était fort incomplète, et que l’étude austère des lois répondait mal aux besoins de sa vive imagination. Son goût