Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/180

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l’important est d’avoir des idées fortes, c’est-à-dire où il y ait une grande force de vérité.

Or, la vérité et sa force ne dépendent point de la tête d’un homme. On appelle un homme fort celui qui tient tête aux objections ; mais ce n’est là qu’une force d’attitude. Un trait obtus, lancé d’une main forte, peut frapper fortement, parce que l’on va du corps au corps ; mais de forts poumons et un fort entêtement ne donneront point de vraie efficacité à une idée faible fortement dite, parce que l’esprit seul va à l’esprit.

Ce n’est pas une tête forte, mais une raison forte qu’il faut honorer dans les autres et désirer pour soi. Souvent ce qu’on appelle une tête forte n’est qu’une forte déraison.

L’esprit dur est un marteau qui ne sait que briser. La dureté d’esprit n’est pas quelquefois moins funeste et moins odieuse que la dureté de cœur.

On est ferme par principes, et têtu par tempérament.