Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/198

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La multitude des affections élargit le cœur.

Il faut tenir ses sentiments près de son cœur.

Lorsqu’on accoutume son cœur à aimer les espèces qui n’existent que pour l’esprit, on n’a plus d’attache qu’aux abstractions, et on leur sacrifie aisément les réalités. Quand on aime tant les hommes en masse, il ne reste plus d’affection à leur distribuer en détail ; on a dépensé toute sa bienveillance pour l’universalité : les individus se présentent trop tard. Ces affections philosophiques, qu’on ne ressent point sans effort, ruinent et dessèchent notre capacité d’aimer.

Si l’apathie est, comme on le dit, de l’égoïsme en repos, l’activité, qu’on vante tant, pourrait bien être de l’égoïsme en mouvement.

Ce serait donc l’égoïsme en action qui se plaindrait de l’égoïsme en repos.

Nul n’est bon, ne peut être utile et ne mérite