Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/216

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de nous contraindre dans notre développement, mais capable de nous défendre, en amortissant tous les chocs, et en opposant sa barrière à nos propres excursions, lorsque trop d’agitation pourrait nous nuire ou nous détruire. Elle établit, entre nos sens et toutes leurs relations, une telle médiation et de tels intermédiaires, que, par elle, il ne peut entrer, dans l’enceinte où l’âme réside, que des images ménagées, des émotions mesurées et des sentiments approuvés.

Est-il besoin maintenant de parler de sa nécessité ? Ce qu’est aux petits des oiseaux le blanc de l’œuf et cette toile où leur essence est contenue ; ce qu’est au pépin sa capsule ; ce qu’est à la fleur son calice, et ce que le ciel est au monde, la pudeur l’est à nos vertus.

Sans cet abri préservateur, elles ne pourraient pas éclore ; l’asile en serait violé, le germe mis à nu et la couvée perdue.

Appliquons cette idée aux faits, et le système aux phénomènes. Nous avons tous de la pudeur, mais non une pudeur pareille. Cette toile immatérielle a des contextures diverses.

Elle nous est donnée à tous, mais ne nous