Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/385

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Un peuple qui veut se distinguer par les lettres, quand il n’est pas très ingénieux, est naturellement porté à se jeter dans le savoir ; c’est sa ressource. La nature donne plus de patience aux esprits qu’elle a créés moins pénétrants.

Plus un peuple est humoriste, plus il est vif et brusque, plus il a d’accent. Son accent annonce en quoi il est peu contenu. Les courtisans, habitués à se contraindre, n’ont point d’accent. Des âmes toujours égales, toujours calmes, toujours élevées, expriment aussi sans accent leurs sentiments et leurs pensées.

Jamais homme éminent n’a gardé pur, c’est-à-dire entier, l’accent de ses compatriotes.

Quand les peuples ont perdu cette heureuse disposition de l’enfance à craindre et honorer les pouvoirs qui sont invisibles, et qu’une audace d’esprit excessive les a mis au-dessus de toute crédulité, ils sont alors sortis de la