Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/440

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livres. Maintenant ce sont les livres qui agissent sur lui.

Après la nouvelle Héloïse, les jeunes gens eurent des prétentions à être amants, comme ils en avaient auparavant à être buveurs ou bretteurs. C’est à la honte du siècle, plus qu’à l’honneur des livres, qu’il arrive que des romans exercent un tel ascendant sur les habitudes et les mœurs.

Les auteurs français pensent, écrivent, parlent, jugent et imaginent trop vite. Et cela vient du vice radical de nos mœurs : nous sommes trop pressés de vivre et de jouir ; nous jouissons et nous vivons trop vite.

Nous n’écrivons pas nos livres quand ils sont faits ; mais nous les faisons en les écrivant.

Aussi, ce qu’ils ont de meilleur est-il masqué d’échafaudages. Ils sont pleins de ce qu’il fallait prendre et de ce qu’il fallait laisser.

Notre éloquence a pris l’habitude de parler