Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/57

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de la rue Saint-Honoré, que dans la petite rue, en « descendant à droite, que j’ai vue à quatre heures du « matin. Je crains que le maire, s’il m’a aperçu, Iip « m’ait pris pour un anglais qui venait examiner les « lieux et peut-être sonder l’Yonne pour y conduire Ih « flotte de Nelson. «

À ce ton de plaisanterie charmante, ne semble-t-il pas qu’on aperçoive dans le lointain les premiers sourires de cette imagination devenue si pathétique et si grave en traversant les événements et les années ? Il faut le dire pourtant, M. Joubert avait quelque part à la sérénité de son ami ; car si, dans le commerce d’une correspondance intime, les lettres montrent celui qui les écrit, elles montrent aussi celui qui les inspire, l’un prenant toujours, ou par complaisance amie ou par imitation involontaire, quelques-unes des couleurs de l’autre. Or la gallé, une gaîté spirituelle et modérée, formait un des traits saillants du caractère de M. Joubert. C’est à sa famille surtout qu’il appartient d’en parler. Il n’était pas de ceux qui, réservan ! toutes leurs grâces pour le dehors, n’apportent dans la vie commune que les caprices de leur humeur ou les langueurs de leur ennui. Personne n’observait plus à la lettre les préceptes qu’il a donnés, et qui, de sa part, étaient plutôt encore des résolutions que des conseils. Aimable avec les siens, autant au moins qu’avec les étrangers, il n’oubliait jamais, au milieu d’eux, qu’il faut, comme il le dit, « porter son velours en dedans et faire plaisir a toute heure. » Je ne crois pas même qu’il eût besoin d’efforts pour atteindre ce but. Les plus vulgaires travaux de la vie commune, les occupations les plus simples, comme les amusements les plus