Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/51

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chaque siècle imprime aux langues quelque changement ; et le même esprit d’invention qui les créa, les détériore en subsistant toujours.

C’est toujours par l’au-delà, et non par l’en-deçà, que les langues se corrompent ; par l’au-delà de leur son ordinaire, de leur naturelle énergie, de leur éclat habituel. C’est le luxe qui les corrompt, et le fracas qui accompagne leur décadence.

Les mots dont le son, la clarté et, pour ainsi dire, le volume sont amoindris, c’est-à-dire, qui n’expriment rien que d’adouci, sont dans le langage ce que les demi-tons sont dans la musique ; ils y forment un genre achromatique. ces mots prennent faveur, lorsqu’une langue, ayant acquis toute son énergie, et en ayant abusé, son affaiblissement devient, quand il est élégant, une nouveauté qui frappe et qui plaît. Les esprits très-cultivés s’en contentent longtemps.

En littérature, il faut remonter aux sources