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ANNÉE 1913

Paris, 2 octobre 1913.

François de Curel est mon maître, non seulement parce que cela me fait plaisir, mais parce que c’est lui, et uniquement lui seul, qui m’a donné la chiquenaude. Sans la lecture de ses pièces rien n’aurait branlé. Il m’a donné la chiquenaude et il m’a donné le ton, je revendique cet air de famille ; cette « ardeur froide », plus ardente et plus acérée chez moi, vient de la belle tenue virile, sobre jusqu’à l’ironie, aiguë jusqu’au sarcasme, qui a tellement retenti chez moi à la lecture de l’Invitée et du Repas du Lion. Avant lui, je n’avais pas cette résonance-là. À 15 ans, j’étais la fille littéraire du Père Lacordaire, à 25, celle de Saint-Just et de Barrès, à 30 enfin, je ne me trompais plus.

Je ne dois rien à Ibsen que j’admire à peine, je le considère, par son moralisme obsédant, comme auteur de grand public, quelque chose dans le genre de