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La motion de M. Villiers relative à l’abolition des droits sur les céréales, a été rejetée par la Chambre des communes. Sir Robert Peel a, dans cette circonstance, rappelé toutes ses anciennes opinions antiéconomiques. Il s’est montré le champion des grands propriétaires, et son discours s’est trouvé en opposition constante avec les principes qu’on croyait désormais adoptés par cet homme d’État. C’est que sir Robert Peel, quelle que soit son opinion, n’avait pas à choisir : il fallait quitter le ministère ou bien combattre la motion. Déjà ébranlé dans son parti, il se perdait tout à fait s’il avait faibli. La question des céréales n’est pas de celles où l’un et l’autre parti peuvent être pris. C’est une question d’argent, une question de puissance aristocratique, et les biens des grands sont assez engagés aujourd’hui pour qu’une diminution dans les baux porte à leurs revenus disponibles un coup funeste. Le rappel des lois céréales aura lieu sans doute, mais le temps de cette réforme n’est pas venu encore à ce qu’il paraît, et lord John Russell lui-même n’a pas osé la proposer.

L’empereur du Brésil a ouvert son parlement. Les finances de ce nouvel empire nécessitent toujours de la part des législateurs une attention sérieuse. Un moment le Brésil a eu l’espoir de voir ses sucres, principal produit de son sol, s’écouler sur les marchés anglais. Mais dans les dernières et mémorables réductions de droits, le sucre des pays à esclaves a été exclu de la mesure : le Brésil n’a donc pas cette ressource, qui pour lui serait immense.

Un journal nantais fait une proposition assez étrange. Il demande que les ouvriers des champs aient un livret comme ceux d’états. La raison qu’il donne nous parait passablement égoïste. Dans la saison des travaux, dit ce journal, les ouvriers trouvent partout de l’ouvrage, ils vont où on les paye le mieux, et c’est là le mal selon lui. Un livret indiquerait qu’ils ont quitté leurs patrons, et une coalition de maîtres pourrait, malgré l’abondance des travaux, retenir à bas prix le salaire des manœuvres. Voilà, certes, une mesure très philanthropique !

15 au soir.


P. S. La Chambre des députés vient de rejeter l’amendement Crémieux. Défendu avec talent par son auteur, cet amendement n’a point été soutenu : son adoption eût entraîné le rejet de la loi du chemin de Bordeaux. On doit féliciter la Chambre de n’avoir pas voulu ajourner encore, pour une simple taquinerie, l’une des lignes les plus importantes du réseau.



FIN DU TOME HUITIÈME.