Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/315

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que partout, l’impôt du sang ; mais ils n’appartenaient à l’État que par leurs sacrifices. On les souffrait sur ce sol où ils étaient nés, où reposaient les os de leurs ancêtres, sans les élever à l’égalité, sans leur donner le droit de bourgeoisie. On n’invoquait plus contre eux la mort de Jésus-Christ, mais leurs usures, leurs rapines, les traits distinctifs de la race qui en faisaient un peuple à part, et leur donnaient d’autres intérêts que les intérêts généraux du pays. En 1806, le gouvernement français accorda un sursis d’un an à tous les cultivateurs non négociants qui se trouvaient débiteurs des juifs[1]. Une ordonnance de

  1. Au palais de Saint-Cloud, le 30 mai 1806.
     Napoléon, etc.
     Sur le compte qui nous a été rendu que, dans plusieurs départements septentrionaux de notre Empire, certains juifs, n’exerçant d’autre profession que celle de l’usure, ont, par l’accumulation des intérêts les plus immodérés, mis beaucoup de cultivateurs de ces pays dans un état de détresse,
     Nous avons pensé que nous devions venir au secours de ceux de nos sujets qu’une avidité injuste aurait réduits à ces fâcheuses extrémités.
     Ces circonstances nous ont fait connaître en même temps combien il était urgent de ranimer, parmi ceux qui professent la religion juive dans les pays soumis à notre obéissance, les sentiments de morale civile qui malheureusement ont été amortis chez un trop grand nombre d’entre eux par l’état d’abaissement dans lequel ils ont longtemps langui, état qu’il n’entre pas dans nos intentions de maintenir ni de renouveler.
     Pour l’accomplissement de ce dessein, nous avons résolu de réunir en une assemblée les premiers d’entre les juifs, et de leur faire communiquer nos intentions par des commissaires que nous nommerons à cet effet, et qui recueilleront en même temps leurs vœux sur les moyens qu’ils estiment les plus expédients pour rappeler parmi leurs frères l’exercice des arts et des professions utiles, afin de remplacer, par une industrie honnête, les ressources honteuses auxquelles beaucoup d’entre eux se livrent de père en fils depuis plusieurs siècles.
     À ces causes : sur le rapport de notre grand juge ministre de la justice et de notre ministre de l’intérieur, notre conseil d’État entendu, nous avons décrété et décrétons ce qui suit :
     Art. 1er. Il est sursis pendant un an, à compter de la date du présent décret, à toutes exécutions de jugements ou contrats, autrement que par simples actes conservatoires, contre des cultivateurs non négociants des départements de la Saxe, de la Roër, du Mont-Tonnerre, des Haut et Bas-Rhin ; de Rhin et Moselle, de la Moselle et des Vosges, lorsque les titres