Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/328

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gérant qui entre en fonctions (sorte de lieutenant de police sous les ordres du cardinal-vicaire) des burettes en argent ; 2o ils payent à l’église des convertis une somme de quatre cents scudi (c’est une amende qui leur a été imposée vers la fin du siècle dernier pour une publication séditieuse ou réputée telle) ; 3o ils payent douze cents scudi pour l’entretien et l’éducation des catéchumènes[1]. Ce dernier impôt surtout est, dans son genre, une merveille. Les juifs, comme tous les Romains, et comme les étrangers, ont besoin d’une permission pour sortir des états pontificaux ; mais les juifs n’obtiennent qu’une permission conditionnelle[2]. Et comment seraient-ils libres dans un pays ou les catholiques mêmes risquent d’être emprisonnés s’ils n’accomplissent pas le devoir pascal ; où les évêques rappellent dans leurs mandements les lois du moyen âge qui condamnaient les blasphémateurs à la flagellation, à l’exil ou à la mort[3] ; où les inquisiteurs provoquent publiquement à la délation, en allouant aux dénonciateurs

  1. J’ai visité le Ghetto à la fin de 1866. Je fixe cette date, parce que les renseignements que je donne ici, et que j’ai recueillis sur les lieux, ne tarderont pas, je l’espère, à devenir inexacts.
  2. Les Archives Israélites du 1er janvier 1857 contiennent la pièce suivante : « Inquisition de Ferrare. Il est par la présente permis au juif…, natif de Ferrare, de s’absenter pendant l’espace d’un mois, afin de se rendre à Bologne pour affaires commerciales, sous la condition expresse que sa conduite sera exempte de toute offense, soif contre notre sainte religion, soit contre les bonnes mœurs, durant son absence du Ghetto ; et que, dès qu’il sera de retour, il remettra au plus tôt la présente à l’inquisition et ne pourra plus s’absenter sans nouvelle permission écrite ; déclarant que la présente licence sera de nulle valeur, si le porteur, dès son arrivée au lieu de sa destination, ne la présente immédiatement à l’évêque, à l’inquisition, ou à leur vicaire dudit endroit, et s’il n’y fait apposer leur visa. Elle sera également sans valeur si les mêmes personnages croient, par de justes raisons, ne devoir pas y avoir égard….
     « Ferrare, le… nov. 1856.
    « Pour le vicaire du saint-office,
    « Fr. Ph. Menghi, des frères Prêcheurs. »
  3. « Nous nous abstiendrons de rappeler de quels châtiments sévères Dieu, dans les saintes Écritures, a ordonné de punir le blasphème, la