Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/200

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l’oublier et il garderait, noire ou rouge, une tache ou une plaie, une tristesse ou une colère.

Aussi on hésite, on recule !

Ne rien dire ? — Mais ils peuvent vous accuser d’être méchant puisque vous ne semblez pas ému de leur douleur ! — Parler ? Mais ils vous en voudront de ce que vous avez souligné leur faute ou leur crime, de ce que vous avez le matin, réveillé par vos larmes, — vos simagrées — des fantômes qui devaient mourir avec le dernier cri, le premier soleil !

Et je ne savais que faire !


Il y avait longtemps que c’était le matin. — Mon père se levait d’ordinaire à sept heures afin d’être prêt pour la classe de huit heures. Je me levais aussi.

Je fis comme toujours ; je m’habillai, mais lentement, et ne mis pas mes souliers ; j’attendis assis sur mon lit.

Il ne venait aucun bruit de leur chambre : un silence de mort.

Enfin, au quart avant huit heures mon père m’appela.

Il ne parut point étonné de me trouver tout prêt : à travers la porte il me demanda du papier et de l’encre ; écrivit une lettre au censeur et une autre à un médecin, et me chargea de les porter.

« Tu reviendras dès que tu les auras remises.

— Je n’irai pas en classe ?

— Non, il faut soigner ta mère malade. Si le censeur te demande ce qu’elle a, tu lui diras qu’elle a