Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/379

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moins évite-t-il la galvanisation des dieux hindous. C’est presque par camaraderie que MM. Coppée et Sully Prudhomme sont des Parnassiens ; ils le veulent énergiquement, ils l’ont proclamé, réaffirmé : personne n’a rien à y dire. Bornons-nous à constater que l’élève mental de Lamartine, de Brizeux, de Gautier, d’Hugo, de Musset et de Murger qu’est M. Coppée, et M. Sully Prudhomme, lamartinien scientifique, ont entre eux ce point d’unité de trancher fortement sur les autres par quelque chose qui leur est commun, et qui est le refus, en général, du grand geste romantique, et une certaine tranquillité bourgeoise, qui fut longtemps la marque de la poésie académique depuis 1830[1] et qui fut académisée en eux, avant, bien que M. Leconte de Lisle fût admis dans la Compagnie.

M. de Heredia se détache du demeurant du groupe, par sa fidélité au sonnet et par son goût classique : c’est là une branche nouvelle du Parnasse qui commence ; elle s’appuie sur Chénier, sur Leconte de Lisle. Elle sourit à certaines volontés du Symbolisme, pas les essentielles ; c’est là une école en formation ; on ne peut que regretter ce maniement exclusif d’une forme et on ne la pourra juger qu’après peut-être de nouveaux travaux de M. de Heredia, de M. Léonce Depont, de M. Legouis.

Il est probable que cette pléiade de sonnettistes n’apportera à la poésie qu’un curieux et très intéres-

  1. Sauf pour Hugo, Vigny, Musset, Leconte de Lisle qui tranchaient ; voir, dans les Souvenirs de Théodore de Banville, l’étude sur Alfred de Vigny, où sa vie académique est caractérisée.