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Le roman socialiste.

Il est assez particulier que le roman français, une fois entré dans sa phase expérimentale, n’ait pas, tout de suite, fixé son attention sur le socialisme, sur les questions ouvrières, sur la révolte en armes ou l’organisation militante du prolétariat. Cela donnerait à croire que nos grands romanciers furent plus habiles à noter des faits, à constater des événements qu’à prévoir. Seul, Stendhal, dans un roman que tout récemment republiait M. de Milly, dans Lucien Leuwen, place, dans les préoccupations désagréables d’un jeune officier de service à Nancy, la crainte d’être un jour forcé d’aller sabrer des ouvriers affamés et mécontents dans des villages industriels de Lorraine.

Balzac, si attentif, dans sa Comédie humaine, à décrire le jeu des institutions de la monarchie de Juillet, la poussée, vers les honneurs et la fortune, de la bourgeoisie, ne s’est pas avisé de prédire le prolétariat. Évidemment, les idées réactionnaires et catholiques de ce grand écrivain, qui regrettait le droit d’aînesse, la pairie, les majorats, et en somme, le faisceau des puissances aristocratiques, lui masque cet avenir qui, pourtant, éclatait dans le présent, auprès de lui, à coups de