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DE L'IMAGINATION


représentations pures d’espace et de temps ; toutes les autres supposent une intuition empirique qui, si elle est unie à la notion de l’objet, et si par conséquent elle devient une connaissance empirique, prend le nom d’expérience. — Une imagination qui produit involontairement des images s’appelle fantaisie. Celui qui est dans l’habitude de prendre ces images pour des expériences (internes ou externes), est un fantaste. — Rêver, c’est être le jouet involontaire de ces imaginations dans le sommeil (qui est un état de santé).

L’imagination est, en d’autres termes, ou poétique (productive), ou simplement remémorative (reproductive). L’imagination productive n’est cependant pas pour cela créatrice ; c’est-à-dire qu’elle ne peut produire une représentation sensible qui n’aurait jamais été donnée à notre faculté de sentir ; il faut toujours que la matière de la représentation lui ait été donnée. On ne pourrait jamais faire concevoir la couleur rouge à celui qui ne connaîtrait que les six autres ; et l’on ne pourrait donner l’idée d’aucune des sept à l’aveugle-né. On ne peut même pas avoir, sans l’expérience, l’idée des couleurs mixtes, qui résultent du mélange de deux autres, par exemple du vert. Le jaune et le bleu, mêlés ensemble, donnent du vert ; mais l’imagination ne produirait pas la plus légère représentation de cette couleur si elle ne l’avait pas vue.

Il en est de même de chacun des autres sens en particulier ; c’est-à-dire que la composition des sensations qui en proviennent ne peut pas être opérée par