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CLEF DE LA SOLUTION


elles ne sont des objets pour moi et ne sont réelles dans le temps passé qu’autant que je me représente qu’une série régressive de perceptions possibles liées par des lois empiriques (soit suivant le fil de l’histoire, soit suivant l’enchaînement des causes et des effets), ou qu’en un mot le cours du monde conduit à une série de temps écoulé comme à une condition du temps présent. Cette série n’est cependant représentée comme réelle que dans l’ensemble d’une expérience possible, et non en soi, de telle sorte que tous les événements écoulés depuis le temps immémorial qui a précédé mon existence ne signifient rien autre chose que la possibilité de prolonger la chaîne de l’expérience, à partir de la perception présente jusqu’aux conditions qui la déterminent dans le temps.

Quand je me représente ainsi tous les objets sensibles existants dans tous les temps et dans tous les espaces, je ne les y place pas avant l’expérience, mais cette représentation n’est autre chose que la pensée d’une expérience possible dans son absolue intégrité. C’est en elle seule que sont donnés ces objets (qui ne sont rien que de simples représentations). Si l’on dit qu’ils existent antérieurement à toute mon expérience, cela signifie seulement qu’ils se doivent rencontrer dans la partie de l’expérience vers laquelle il me faut toujours remonter en partant de la perception actuelle. Quelle est la cause des conditions empiriques de ce progrès ; par conséquent quels membres puis-je rencontrer, ou même jusqu’où puis-je en rencontrer dans la régression ? C’est ce qui est transcendental et par conséquent me demeure inconnu. Aussi bien n’est-ce pas de cela qu’il s’agit, mais de la règle de la progression de l’expérience, où les objets, c’est-à-dire les phénomènes, me sont donnés. Il est d’ail-