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CRITIQUE DU JUGEMENT ESTHÉTIQUE


à la forme, déterminée par des concepts qui indiquent ce qui doit être ; et alors la satisfaction, comme nous l’avons montré plus haut, n’est pas celle du beau, mais celle du bien (de la perfection, au moins de la perfection formelle), et le jugement n’est pas un jugement de goût. Un rapport de conformité à des lois qui ne suppose aucune loi déterminée, un accord subjectif de l’imagination avec l’entendement, et non un accord objectif comme celui qui a lieu quand la représentation est rapportée au concept déterminé d’un objet, voilà donc ce qui seul peut constituer une libre conformité aux lois de l’entendement (laquelle est aussi appelée finalité sans fin), et en quoi consiste la propriété d’un jugement de goût.

Or les critiques du goût citent ordinairement comme les exemples les plus simples et les plus incontestables de la beauté les figures géométriquement régulières, comme un cercle, un carré, un cube, etc. Et cependant on ne les nomme régulières, que parce qu’on ne peut les représenter qu’en les considérant comme de simples exhibitions d’un concept déterminé (qui prescrit à la figure sa règle). Il faut donc que l’une de ces deux manières de juger soit fausse, ou celle des critiques qui attribue de la beauté à ces sortes de figures, ou la nôtre qui trouve la finalité sans concept nécessaire à la beauté.