Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome premier.djvu/339

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subjectif (que c’est une jouissance ou une douleur), et qu’ici le jugement n’a pas le droit d’exiger l’assentiment d’autrui.

Le second lieu commun du goût, celui qu’invoquent ceux même qui attribuent au goût le droit de porter des jugements universels, est celui-ci : on ne peut pas disputer du goût. Ce qui signifie que le motif d’un jugement de goût peut bien être objectif, mais qu’il ne peut pas être rapporté à des concepts déterminés, et que, par conséquent, dans ce jugement, on ne peut rien décider par des preuves, quoiqu’on puisse contester avec raison. S’il y a en effet entre contester et disputer cette ressemblance que dans l’un et l’autre cas on cherche à se mettre réciproquement d’accord en se contredisant réciproquement, il y a cette différence que dans le dernier cas on espère arriver à ce but en invoquant pour ses motifs des concepts déterminés, et qu’on admet ainsi, comme principes du jugement, des concepts objectifs. Mais quand cela est impossible, il est impossible aussi de disputer.

On voit facilement qu’entre ces deux lieux communs il manque une proposition, qui n’est pas, il est vrai, passée en proverbe, mais que chacun admet implicitement, c’est à savoir qu’on peut contester en matière de goût (non pas disputer).