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Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/183

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conduit dans la Critique me demandera sur quoi je fonde cet espoir ? Je réponds : sur l’irrésistible loi de la nécessité.

Que l’esprit de l’homme abandonne un jour entièrement les recherches métaphysiques, c’est à quoi il ne faut pas plus s’attendre qu’à ne plus respirer du tout pour ne plus absorber d’air impur. Il y aura donc toujours dans le monde, et ce qui est plus encore, dans chaque homme, surtout chez celui qui réfléchit, une métaphysique qu’à défaut d’une règle publique, chacun se formera à sa manière. Or, si ce qui s’est appelé jusqu’ici métaphysique ne peut satisfaire aucun esprit qui réfléchit, il lui est cependant impossible d’y renoncer entièrement. Une critique de la raison pure même doit donc enfin être cherchée, ou, si elle existe, être étudiée et soumise à un examen général, parce qu’autrement il n’y a pas moyen de se garantir du besoin pressant qui est encore quelque chose de plus qu’un simple désir de savoir.

Depuis que je connais la Critique je n’ai pas pu ne point me demander, après avoir lu un ouvrage métaphysique qui m’avait intéressé et formé par la détermination de ces notions, par la diversité, l’ordre et la clarté de l’exposition, si cet auteur avait fait avancer la métaphysique d’un seul pas. J’en demande pardon aux savants dont les ouvrages m’ont servi à d’autres égards, et ont tous contribué au développement de mes facultés, mais je confesse que je n’ai pu trouver dans leurs travaux ni dans mes faibles essais (auxquels cependant l’amour-propre donne l’avantage) que la science ait par