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Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/244

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puérilité, et une aussi longue réfutation ne mériterait même pas un autre nom. Mais la Critique (pour ne donner qu’un seul exemple entre beaucoup d’autres), prouve qu’il y a dans le monde corporel, comme ensemble de tous les objets des sens extérieurs, partout même des choses composées, mais que le simple ne s’y trouve point. Elle fait voir en même temps que la raison, quand elle conçoit un composé de substances comme une chose en soi (sans le rapporter à la propriété particulière de nos sens), doit le concevoir absolument comme formé de substances simples. En dehors de ce que l’intuition des objets suppose nécessairement avec soi dans l’espace, la raison ne peut et ne doit rien concevoir de simple qui serait en eux ; d’où il suit qu’alors même que nos sens seraient doués d’une pénétration infinie, il leur serait cependant tout à fait impossible d’approcher même de plus près du simple, et bien moins encore de l’atteindre, parce qu’il ne s’y trouve point. Pas d’autre issue alors que de confesser que les corps ne sont pas des choses en soi, et que la représentation sensible que nous rapportons au nom des choses corporelles n’est que le phénomène de quelque chose qui, comme chose en soi, peut seulement contenir le simple[1], mais nous est

  1. Se représenter un objet comme simple est un concept purement négatif, inévitable à la raison, parce qu’il contient seul l’inconditionné de tout composé (comme chose, non comme simple forme), dont la possibilité est toujours conditionnée. Cette notion n’est donc pas une partie extensive de la connaissance, mais elle indique simplement un quelque chose en tant qu’il doit différer des objets des sens (qui contiennent tous une composition). Quand donc je dis : ce qui est la raison de la possibilité du composé, qui par conséquent peut seul être conçu comme non