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Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/386

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PROGRÈS DE LA MÉTAPHYSIQUE


tion a priori d’une chose en général, une notion ontologique par conséquent, nous mettons toujours en principe, dans notre pensée, comme notion première, celle d’un être universel, l’être le plus réel de tous ; car une négation, comme détermination d’une chose, n’est jamais qu’une représentation’dérivée, parce qu’on ne peut la concevoir comme retranchement (remotio) sans avoir auparavant conçu la réalité qui lui est contraire comme quelque chose qui est posé (positio, seu reale). Ainsi quand nous convertissons cette condition subjective de la pensée en condition objective de la possibilité des choses mêmes, toutes les négations doivent être considérées comme de simples limites de la notion universelle {Allinbegriffes) des réalités ; toutes les choses, à l’exception de celle-là seule qui est la raison de leur possibilité, ne doivent donc être regardées que comme dérivées de cette dernière.

Celle-ci seule, dont on s’étonne que la métaphysique se soit ensorcelée à ce point, est le souverain bien métaphysique. Elle contient la matière propre à faire toutes les autres choses possibles, comme le bloc de marbre sert à faire des statues de toutes sortes, qui ne sont toutes possibles que par limitation (séparation de tout le reste d’avec une certaine partie du tout, par conséquent par négation). Ainsi le mal moral ne se distingue du bien dans le monde que comme l’élément formel des choses, de même que les ombres dans la lumière solaire qui inonde l’univers, et les êtres qui composent le monde ne sont mauvais que parce qu’ils