Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome IX, 1825.djvu/178

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1569. du tyran. Celui qui, au mépris des lois, avait voulu monter sur le trône ; qui, lors de la maladie du tzar, avait refusé de lui obéir, s’était réjoui à l’idée de sa mort prochaine, avait soudoyé les grands et les soldats pour les exciter à la révolte ; le prince Vladimir enfin existait encore ! Seize ans s’étaient écoulés depuis ses fautes, mais le tzar en conservait le souvenir et se défiait toujours de lui. Aucun boyard n’osait entretenir des relations d’amitié avec ce prince. Il n’était entouré que d’espions chargés de l’observer et de rapporter la moindre parole indiscrète qui lui serait échappée. Quel puissant motif pouvait donc sauver ce malheureux du trépas ? serait-ce l’horreur naturelle que l’on éprouve à tremper ses mains dans le sang d’un de ses proches ? Il faut le supposer, car il est des momens où le tyran le plus endurci se trouve comme arrêté dans ses fureurs : il est homme quelquefois encore ; il n’aime plus le bien, mais il craint l’excès dans le mal ; troublé par sa conscience, il croit l’apaiser par l’idée qu’il existe des forfaits dont il s’est abstenu ; mais ce frein offre de faibles garanties ! Le crime précipite dans le crime, et, malgré le pardon qui lui avait été annoncé en 1563, malgré l’hypocrisie de Jean, qui lui témoignait constam-