Page:Keats - Poèmes et Poésies, trad. Gallimard, 1910.djvu/15

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étroitesse voulue, conséquences inévitables de pareils partis pris? Peut-être des défenseurs, trop favorables, auraient-ils, à leur tour, le droit d’invoquer la brièveté de sa vie qui ne lui permit pas de faire saillir tout ce qui était en germe dans son cerveau ?

Quoiqu’il en soit, ce regret une fois discrètement exprimé, il faut, sans plus, constater que, dans un si court laps de temps, il n’a pu avoir qu’une manière. Évidemment — et il n’est pas téméraire de le supposer — s’il eût atteint sa pleine maturité, il eût élargi son champ d’activité intellectuelle, eût concentré davantage les sujets de ses poèmes et les eût mieux composés ; mais, qui osera soutenir qu’il aurait rendu plus parfaits ses chefs-d’œuvre : la classique Ode sur l’Urne grecque[1] par exemple, ou l’admirable fragment de l’Ode à Maïa[2] ou même une œuvre de jeunesse écrite lorsqu’il n’avait que vingt ans, le Sonnet : « En ouvrant pour la première fois l’Homère de Chapman[3] », etc...

Cet amour de la forme et de sa perfection était tellement inné en lui que dès ses débuts, on ne sent presque aucune hésitation, aucun tâtonnement. Son éducation première n’ayant pas été très poussée, son seul instinct l’avait incité à lire

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