Page:Kipling - Au hasard de la vie, trad. Varlet, 1928.djvu/278

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à la fin un atome de leur zèle ; des régiments anglais boudent parfois sous la pénitence, tandis que les Irlandais, comme les Français, sont capables de s’élancer en avant par un et par deux, ce qui ne vaut pas mieux du tout que de fuir vers l’arrière. S’il est vraiment sage, un chef qui commande des hommes arrivés à cette haute tension leur permet, dans les intervalles d’attente, d’entendre le son de leurs propres voix, et leur fait entonner des chansons. Une légende rapporte qu’un régiment anglais couché sous le feu auprès de ses armes, se mit à chanter « Sam Hall », à l’horreur de son nouveau colonel qui était pieux. Les Boneens Noirs, qui souffraient plus que les Mavericks, sur un monticule éloigné d’un demi-kilomètre, ne tardèrent pas à faire savoir à quiconque voulait l’entendre :

Nous sonnerons l’hallali, du centre du pays jusqu’à la mer,
Et l’Irlande sera libre, a dit le Shan-van Vogh.

— Chantez, les gars, dit à mi-voix le père Dennis. Sinon ces Afghans vont croire que nous avons peur de leurs petits pois.

Dan Grady se releva sur les genoux et entonna un chant à lui enseigné, comme à beaucoup de ses camarades, dans le plus strict secret, par Mulcahy — ce Mulcahy alors couché dans l’herbe, inerte et défaillant, en proie à la peur glacée de la mort.

L’une après l’autre chaque compagnie reprit ses paroles qui, dit l’I. A. A., sont destinées à proclamer le soulèvement général d’Erin, et qu’on ne peut sous