Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/100

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
88
le chien d’or

— Pas disposé ! votre Excellence ?

Il se leva pour répondre et ses jambes fléchirent. Brave, le verre en main, il tira son épée du fourreau et la mit sur la table.

— Je demande que la compagnie boive cette santé à genoux ! dit-il, et de mon sabre que voici, je couperai les jarrets du mécréant qui refusera de s’agenouiller et de boire une pleine coupe, aux yeux adorables de la plus belle Québecquoise, l’incomparable Angélique Des Meloises !

La santé fut acclamée. Chacun remplit son verre en l’honneur de la beauté partout admirée.

— À genoux ! cria l’Intendant, ou de Péan va nous couper les jarrets !

Tous s’agenouillèrent ; plusieurs ne purent se relever.

— Nous allons boire, continua-t-il, à Angélique, la plus belle des belles ! Des Meloises ! Allons ! tous ensemble !

La plupart reprirent leurs sièges au milieu des rires et d’une joyeuse confusion.

Alors, un jeune débauché, excité par le vin et le tapage, le sieur Deschenaux, debout sur ses jambes mal affermies, éleva une coupe où trempaient ses doigts :

— Nous avons bu avec tous les honneurs, commença-t-il, aux yeux adorables de la belle de Québec ; je demande à tous les gentilshommes, de boire maintenant aux yeux plus ravissants encore de la belle de la Nouvelle-France.

— Qui est-elle ? Son nom ! son nom ! exclamèrent une douzaine de voix… Le nom de la belle de la Nouvelle-France !…

— Qui est-elle ? Comment ! quelle autre que la belle Angélique mérite d’être appelée ainsi ? reprit de Péan avec chaleur et jalousie.

— Tut ! répliqua Deschenaux, vous comparez un ver luisant à une étoile, quand vous comparez Angélique Des Meloises, à la dame que je veux honorer. Je demande que les coupes débordent en l’honneur