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le chien d’or

teille de cognac d’un côté, un flacon de cidre de Normandie de l’autre, et avec lui, pour boire et manger mieux, un ou deux bons compères. Alerte, avec des pieds mignons et des mains habiles, la belle Zoé Bédard s’empressait à les servir.

Oui ! ce tableau d’un bonheur parfait flottait devant les yeux fatigués de maître Pothier, et il était ravi de cet Éden nouveau, sans arbres et sans fleurs, mais orné de tables, de coupes, de plateaux et de tout ce qu’il fallait pour les bien remplir.

— Un digne gentilhomme et un brave officier ! je le jure ! disait-il en galopant. Il est généreux comme un prince, attentif comme un évêque, capable de faire un juge, et un juge en chef, encore ! Que voudriez-vous faire pour lui, maître Pothier ? Je réponds à l’interrogation de la cour : je ferais son contrat de mariage, je rédigerais ses dernières volontés, son testament, avec le plus grand plaisir et gratuitement. Pas un notaire, dans la Nouvelle-France, ne pourrait faire plus ! Alors son imagination vagabonde se porta sur un texte qu’il aimait beaucoup, « la grande nappe toute couverte d’oiseaux et de poissons de diverses espèces, bons à manger : » et il répéta les paroles bibliques ; mais la langue lui fourcha, et au lieu de dire : Pierre, lève-toi, tue et mange ! il cria : Pothier, lève-toi, tue et mange !