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LE CHIEN D’OR

rai ! se dit-elle en se regardant dans la glace étincelante. Je régnerai ! Mort aux prétendantes !

Et que faut-il pour cela, après tout ? pensa-t-elle en relevant les boucles blondes qui roulaient sur ses tempes palpitantes. Rien, que vaincre le cœur d’un homme ! Que de fois j’ai accompli cette prouesse, par plaisir ! Je vais l’accomplir par intérêt maintenant, et pour faire crever mes rivales de dépit !

VI.

Quand Angélique entreprenait quelque chose, par caprice ou par ambition, elle ne se laissait pas décourager facilement.

— Je n’ai pas encore rencontré un homme qui ne soit tombé à mes pieds quand je l’ai voulu, se dit-elle ; le chevalier Bigot ne sera pas l’exception, c’est-à-dire, s’il en dépend de lui, murmura-t-elle à voix basse.

Et elle continua !… S’il était délivré de l’influence de cette mystérieuse créature de Beaumanoir ! de cette femme qui se prétend son épouse !… Elle le regardera avec des pleurs, et elle excitera sa pitié peut-être, quand elle ne devrait soulever que son mépris… Mais les hommes ferment souvent les yeux sur les fautes d’une femme, et se montrent implacables pour la vertu d’une autre ! Tant qu’elle sera là, blottie comme une lionne, dans mon chemin, je ne pourrai devenir la châtelaine de Beaumanoir ! Non, jamais !

Angélique tomba dans une rêverie profonde. De temps en temps elle murmurait :

— Je n’aurai jamais Bigot tant qu’elle sera là… Mais comment l’éloigner ?

C’était l’énigme. De la réponse dépendait maintenant l’existence rêvée.

Elle tremblait en cherchant la solution du problème. Un frisson courut dans ses veines comme si le souffle glacé d’un esprit malfaisant eut passé sur sa tête. Quelquefois un mineur, en perçant le terrain, détache une pierre cachée qui l’écrase.