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le chien d’or

La femme coupable a su, par un conseiller parjure, ce qui s’est passé au conseil. Quel peut être ce conseiller ? quelle peut être cette femme ?

— Par Dieu ! Bigot, les déductions vont comme l’eau dans un rapide. Mais je ne croyais pas qu’il se trouvât deux femmes, dans la Nouvelle-France, assez adroites et capables d’assez bien s’entendre pour exécuter ce diabolique complot.

— Si les personnages du drame se multiplient comme cela, observa Bigot, il me semble qu’Angélique n’y a point pris part. Une femme si jeune, si belle, si charmante, ne saurait méditer pareille trahison.

— Beau dehors, vilain dedans ! riposta Cadet, avec son cynisme habituel. Voulez-vous lui voir danser un ballet de triomphe sur la tombe de sa rivale ? Épousez-la ! je parie qu’elle donne un bal dans la chambre secrète…

— Taisez-vous, Cadet ; je pourrais vous étouffer !… Mais, je ferai mieux : je la mettrai en demeure de prouver son innocence.

— Pas aujourd’hui, j’espère ! Laissons un peu dormir la morte ; laissons reposer les chiens et les chiennes ! Parbleu ! nous courons de plus grands dangers qu’Angélique. Vous surtout, car vous êtes en son pouvoir ! Pour se sauver, elle vous accusera. Le roi vous récompensera du splendide mensonge que vous avez fait au gouverneur, en vous ouvrant les portes de la Bastille, et la Pompadour vous enverra à la Place de Grève, quand le baron de St. Castin arrivera en France avec les restes de sa fille tirés de votre caveau.

— C’est un affreux dilemme, Cadet, un affreux dilemme ! murmura Bigot, dans une angoisse profonde.

De quelque côté que nous nous tournions, tout est ténèbres… Angélique en sait trop long, c’est évident ; et si elle disparaissait à son tour !…

— Tut ! tut ! inutile de songer à cela ; elle est trop connue, trop aimée. Elle ne saurait être jetée dans un coin comme sa pauvre victime.