Page:Kirby - Le chien d'or, tome II, trad LeMay, 1884.djvu/270

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
270
LE CHIEN D’OR

de Repentigny est disparue de nos bords ; son nom, sa gloire sont oubliés, mais dans la chapelle des saints, la lampe brûle toujours !

IX.

Héloïse et Amélie demeurèrent longtemps en prière à genoux devant la Vierge, mère des affligés. Elles versèrent des larmes abondantes, en demandant miséricorde pour Le Gardeur et paix éternelle pour l’âme du bon bourgeois.

Le souvenir de Pierre Philibert se mêla au souvenir du criminel et à celui de la victime, ils étaient inséparables !…

Amélie, dans son angoisse extrême, sentait par instant son cœur se révolter… Devait-elle donc s’offrir ainsi en sacrifice pour la faute d’un autre ?…

Tout à l’heure, son âme débordait de joie comme une fontaine de vin généreux ! tout à l’heure elle, la pauvre désespérée, elle était un objet d’envie !… Le cloître, le voile qui l’envelopperait comme un suaire, c’était donc tout ce qui lui restait de ses félicités promises !

Une religieuse priait, et tout absorbée dans sa méditation, les yeux cloués sur le tabernacle, ne voyait rien, n’entendait rien de tout ce qui se passait autour d’elle.

— Mère Sainte Vierge, lui dit Amélie qui se sentait faiblir sous le poids de sa croix, mère Sainte Vierge, priez pour moi !…

La religieuse tourna vers elle des yeux pleins de pitié :

— Il faut s’humilier avec le divin époux avant de partager sa gloire ; il faut souffrir et monter avec lui la route du calvaire avant de monter au ciel et de boire à la source de l’éternelle félicité !…

Son regard s’anima soudain, sa voix devint presque vibrante dans le silence sacré quand elle ajouta :

— Voilà trente ans que j’entretiens votre lampe, ô filles de Repentigny, venez prendre ma place, Dieu le veut… Laus Deo !