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LE CHIEN D’OR

IV.

Madame de Tilly avait déclaré à la mère Supérieure que ses nièces seraient richement dotées, et mère Migeon ressentit une grande joie de cela, car le couvent se trouvait dans une position difficile depuis quelques années. La guerre avait épuisé les sources de revenus et l’inquiétude se glissait forcément dans l’esprit de celles qui étaient chargée de l’administration. Elles cachaient bien, autant que possible, la situation à la communauté, pour ne pas la distraire de la prière et de la méditation, mais l’heure redoutée n’aurait pas manqué de sonner enfin.

Cependant, les bonnes religieuses s’étaient déjà soumises de grand cœur à bien des privations. C’était presque la ration des naufragés. Mais la patrie souffrait et il était doux en quelque sorte de souffrir avec elle et pour elle.

Depuis longtemps le tronc de St. Joseph, pour les pauvres, ne se remplissait plus. St. Joseph au blé, veillait depuis longtemps sur des magasins vides, St. Joseph au labeur restait insensible aux supplications des cuisinières qui lui demandaient des aliments en quantité suffisante, au moins.

V.

— Je remercie St. Joseph de ce qu’il nous donne et de ce qu’il nous ôte, dit mère St. Louis à l’oreille de mère St. Antoine, comme elles sortaient ensemble de la chapelle. Le jour qu’Amélie de Repentigny fera profession, sera pour nous le jour des noces de Cana. L’eau se changera en vin. Je n’aurai plus besoin de ramasser les miettes, excepté pour les mendiants.

VI.

Les jours vinrent et s’enfuirent avec leur continuel lot de peines et de joies. Le temps inexorable marchait toujours son pas mesuré, également sourd aux langueurs de l’ennui et aux désirs satisfaits.