Page:Kleist - Contes, t. 2, trad. Cherbuliez, 1832.djvu/186

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l’œil pouvait atteindre, on voyait des hommes de tous les états couchés les uns auprès des autres. Des princes et des gueux, des dames et des paysannes, des administrateurs et des journaliers, des moines et des religieuses souffraient tous les mêmes maux, se portaient secours mutuellement, partageaient avec amitié ce qu’ils avaient pu sauver pour l’entretien de leur existence, comme si le malheur commun qui les avait accablés en eût fait une seule famille.

À la place de ces conversations futiles, qui occupent ordinairement les loisirs du monde, on entendait le récit d’actions extraordinaires ; des hommes que jusqu’alors la société avait méprisés, s’étaient montrés doués d’une grandeur d’âme vraiment romaine ; on citait mille exemples de fermeté, de mépris du danger, d’abnégation de