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Il est, d’autre part, fort supposable que cette prononciation aux syllabes sonores aux e gardant leur valeur intégrale, ne fut point un apport du règne de Louis XIV, mais un mode demeuré dans l’usage oral, vestige de la latinité originelle ; la langue latine étant restée jusqu’à François Ier la langue des sciences et de la juridiction et jusqu’à nos jours celle du culte.

À partir de quel moment la prononciation française s’est-elle dégagée de cette dernière trace romaine ? Là n’est point la question, mais, telle qu’elle, il est normal que la parole parlée ait son reflet fidèle dans la poésie écrite contemporainement.

« Que chaque siècle écrive la langue qu’il parle » a dit M. Villemain[1].

Il est juste que cette parole rendue à la sonorité par l’effet de la récitation devant un auditoire, n’ait besoin de retourner à aucune syllabisation conventionnelle et archaïque pour garder un rythme voulu par l’auteur.

Cela nous parait si évident, qu’en renversant la proposition nous sommes grandement heurté par l’exécution (assez cruelle) des poètes anciens selon l’école théâtrale moderne.

« A| ri | a | ne | ma | sœur | par quel amour blessée » chantait Mlle  Clairon, et cela faisait douze syllabes.

« A | riann | ma | sœur | etc… » récite la Comédie Française de nos jours et cela n’en fait plus que dix.

Et Racine n’a pas son compte, et Racine n’est pas joué en mesure.

Un comédien nous disait :

  1. Cours de Littérature Moyen Âge, t. II.