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gendré cette secte de vagabonds, les « asketes », lesquels s’en vont à travers le pays, à peine vêtus, couverts de branchages de chêne et marchant pieds nus. Ne travaillant jamais, ils vivent aux dépens des pauvres paysans qui leur donnent asile et les nourrissent parce qu’ils les considèrent comme des Saints-Idiots ou des Sorciers.

Dans toutes les légendes où Satan joue le principal rôle, cet être imaginaire, dont la mission est de faire autant de mal que possible aux hommes, est battu par sa femme ; le soldat le rembarre à coups de crosse de fusil et souvent il est écrasé sous le marteau du forgeron, car après Jésus-Christ, Satan et le soldat, les grands rôles dans les légendes sont tenus par le forgeron et le meunier.

De tout temps les peuples ont adoré l’eau et le feu et de nos jours encore le paysan russe regarde ces deux éléments comme mystérieux et au-dessus de sa compréhension. Aussi les gens qui sont en contact direct avec eux passent-ils chez les peuples slaves pour des sorciers.

Suivant les traditions religieuses la divinité a souvent opéré des métamorphoses. Certaines nous content l’histoire d’un homme changé en ours ou d’une femme changée en oiseau. Chez un peuple voisin de la Russie, en Norvège, une légende veut qu’une femme coupable ait été, comme punition, métamorphosée en pie, « oiseau qui a toujours soif. »

Ces légendes sans nombre, qui guident le paysan russe dans presque tous ses actes de la vie quotidienne, contribuent pour beaucoup à le maintenir dans un état d’ignorance absolue. Quelques-uns de leurs préjugés les plus enracinés, et dont le plus grand nombre indiquent des signes précurseurs de malheur, sont pourtant explicables dans une certaine mesure. Dans sa chaumière, sur les routes ou aux champs le moujick reste esclave de ses préjugés. La place nous manque ici pour les consigner tous et nous renverrons le lecteur à un intéressant volume de 300 pages qu’a publié sur ce sujet le savant encyclopédiste Dall, nous bornant à citer quelques-uns de ceux auxquels le peuple est plus particulièrement attaché : Une rencontre avec un serviteur de Dieu (pope) est considérée comme de très mauvais augure, et cette terreur des prêtres est basée sur le rôle des juges attribuée autrefois aux membres du clergé russe. Le paysan doit encore s’attendre à un malheur si sur sa route il fait la rencontre d’un lapin ! Chose curieuse, bien des paysans en Russie se refusent à manger les oiseaux sauvages et ils expliquent cette répugnance avec une