oici une corbeille de personnages divers, quelques-uns
importants, d’autres moins, qui sont autant de touches
de couleurs dans le tableau artistique et littéraire de l’Entre-deux-guerres. Morts ou vifs, ils contribuent à la perspective.
Ils témoignent du fort et du faible de la société parisienne. Je
les présente ici au naturel, sans autres liens que celui du
temps et de la fréquentation.
Félicien Rops, l’aquafortiste hanté que l’on sait, avait une belle mine, haute et fière, de reître du XVIe siècle. Il lui manquait seulement le pourpoint de velours et l’épée. Il ne lui manquait ni la fine moustache, ni la barbiche, ni le visage triangulaire, ni le feu du regard, toujours en mouvement. Il parlait vite, en faisant chevaucher les mots comme les tuiles d’un toit, inventait à mesure des histoires extraordinaires et merveilleuses, à la réalité desquelles il croyait aussitôt. Tantôt à cheval à travers les pampas, dont il dépeignait l’ardeur en plein midi, tantôt coupant la brousse avec de hardis compagnons, tantôt seul en un canot au milieu des banquises, chassant l’ours et le bouquetin, il avait accompli des exploits capables de remplir une cinquantaine d’existences humaines bien occupées. C’était un mirage, mais d’un détail, d’une minutie, d’une précision poétique qui atteignaient au grand art.