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JUILLET-SEPTEMBRE 1923.

p. 203 et 214, lisent kārdaraṅga ; l’épithète kirmīra, choisie à dessein pour l’allitération, suffirait à garantir la leçon kārmaraṅga, corsée encore par l’emploi du mot carma qui suit : kirmīrakārmaraṅgacarma°. Le commentateur Śaṁkara, dans son Saṁketa, glose sur le premier passage : kārdaraṅgakāni kārdaraṅgadeśodbhavāni bahusuvarṇasûtraracitāni carmāṇi. sphoṭakāḥ snigdhavarṇamāṁsasphārāṇi kārdaraṅgacarmāṇi « des cuirs provenant du pays de Kārdaraṅga, fabriqués avec beaucoup de fils d’or ; les peaux de Kārdaraṅga ont une masse de chair de couleur luisante » ; sur le second passage, il répète que Kārdaraṅga est le nom du pays d’origine de ces boucliers : kārdaraṅgadeśabhavānām spheṭakānām. Il faut donc supprimer l’explication donnée par Böhtlingk (PW2, sub verbo) : « hochroth (rouge intense) ; cf. kṛmirāga ». En outre du Karmaraṅga, le Mañjusrīmūlakalpa mentionne aussi le nom du Carmaraṅga par deux fois, au chap. 20, p. 206 et au chap. 22, p. 233 ; dans l’un et l’autre passage, le Carmaraṅga figure en compagnie de Kalaśavarapura (Kalaśāhvā, p. 206 ; Kalaśamukhya, p. 233), de Samatata et de Vaṅga. Les deux derniers pays conduisent au delta du Gange ; Kalaśapura (ou Kalaśavarapura, etc.) est une ville du Suvarṇadvīpa, au témoignage du Kathāsaritsāgara, 54, 108 (la Mañjarī, dans le récit correspondant, XV, 207 et suiv., ne donne pas le nom de la ville). Dans le recueil de miniatures népalaises étudié par M. Foucher (Étude sur l’iconographie bouddhique de l’Inde), la représentation de « Bhagavat à Kalaśavarapura » (ms.  À 15, Calcutta, no 13) suit immédiatement celle de « Dīpaṅkara à Yavadvīpa » (ibid., no 12). M. Pelliot a réuni (B.É.F.E.-O., IV, 360) plusieurs textes chinois qui mentionnent cette ville et d’où il sort que Kalaśapura était situé au nord du To-ho lo, situé lui-même au nord du P’an-p’an, lequel se localise sur la péninsule malaise, à la hauteur de Bandon ou Ligor. Carmaraṅga nous ramènerait donc dans les mêmes parages que Karmaraṅga et ne serait