Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/206

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tendu raconter par l’artiste qui avait peint, sans pinceaux, toutes ces peintures, blanches, bleues ou rouges que vous voyez là ; le peintre, en montrant au roi Pharamond le château, arrivé à ce rocher d’Ischia que je viens de vous faire voir, lui dit ce que je vais vous répéter.

« Il lui dit que, du brave chevalier qui le défendait avec tant d’ardeur, et qui semblait mépriser le feu qui de tous côtés l’entourait jusqu’au phare, devait naître en ces temps ou à peu près — et il lui dit l’année et le mois — un chevalier, qui surpasserait tous ceux qui jusqu’alors avaient existé au monde.

« Nirée avait été moins beau, Achille moins brave, Ulysse moins hardi, Lada moins léger à la course, Nestor moins prudent, lui qui sut tant de choses et qui vécut si longtemps, César moins libéral et moins clément, que ne devait être celui qui naîtrait dans l’île d’Ischia, et qui devait dépasser toute la renommée de ces grands hommes.

« Et si l’antique Crète se glorifia d’avoir donné naissance au petit-fils de Célus ; si Thèbes fut fière de Bacchus et d’Hercule ; si Délos s’enorgueillit des deux jumeaux, cette île pourra aussi se réjouir et se dresser fièrement sous le ciel, quand naîtra dans son sein le grand marquis envers lequel le ciel se montrera si prodigue de faveurs de toute sorte.

« Ainsi lui dit Merlin, et il lui répéta à plusieurs reprises que ce héros devait naître à l’époque où l’empire romain serait le plus opprimé, pour qu’il