Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/246

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’une épaisse barbe blanche qui descend sur la poitrine. Et son aspect est si vénérable, qu’on le prendrait pour un des élus du paradis.

Il aborde d’un air joyeux le paladin, qui est descendu respectueusement de cheval, et lui dit : « Baron, qui par la volonté divine es monté jusqu’au paradis terrestre, bien que tu ne saches pas pourquoi tu as fait le chemin, ni dans quel but tu es venu, tu peux croire que ce n’est pas sans un éclatant miracle que tu es arrivé de l’hémisphère arctique.

« Pour apprendre comment tu dois secourir Charles, et délivrer de tout péril la sainte Foi, tu es venu, par un si long chemin et sans guide, me demander conseil. Je ne voudrais pas, ô mon fils, que tu crusses que c’est grâce à ton savoir et à ton courage que tu es parvenu jusqu’ici. Ni ton cor, ni ton cheval ailé ne t’auraient servi de rien, si Dieu ne t’avait point donné d’y venir.

« Nous nous entretiendrons plus tard plus à notre aise, et je te dirai comment tu devras agir. Mais auparavant, viens te récréer avec nous, car un plus long jeûne doit te peser. » Le vieillard, continuant à lui parler, étonna beaucoup le duc quand il lui apprit son nom ; et il lui dit qu’il était celui qui écrivit l’Évangile ;

Ce Jean, qui fut si cher au Rédempteur, et à qui ce dernier annonça que, seul entre ses frères, il ne devait pas finir sa vie par la mort, ce qui fut cause que le Fils de Dieu dit à Pierre : « Pourquoi t’étonnes-tu si je veux qu’il attende ainsi ma